Obligations assurantielles des professions réglementées
Les professions réglementées sont soumises à un devoir de conseil et d’information qui leur imposent la plus grande prudence vis-à-vis de leurs clients afin de les assister au mieux. Les litiges consécutifs à un manquement en la matière s’avèrent souvent complexes. C’est la raison pour laquelle ces spécialistes doivent obligatoirement souscrire à une assurance Responsabilité Civile Professionnelle. Stéphanie LAROCHE, Expert en risque financiers et Vincent Blondin, Manager Risques Financiers au sein de Stelliant Expertise, nous livrent leurs points de vue d’experts.
Les différentes facettes des professions réglementées
Les professions réglementées regroupent des activités diverses et variées mais sont traditionnellement réunies autour de quatre grandes familles :
- Les professionnels de l’Immobilier : agents immobiliers, administrateurs de biens, syndics de copropriété, géomètres, diagnostiqueurs immobiliers…
- Les professionnels du Chiffre : experts-comptables et commissaires aux comptes.
- Les professionnels du Droit : notaires, avocats, huissiers, mandataires judiciaires…
- Les professionnels du conseil, de la finance et de l’assurance : conseillers en gestion de patrimoine, conseillers en investissements financiers, intermédiaires en opérations de banque, agents d’assurance, courtiers…
Cette liste n’est toutefois pas exhaustive puisque d’autres secteurs d’activité sont également soumis à une réglementation spécifique (Professionnels de la Santé, Agences de voyage…).
Afin de répondre aux tiers mettant en cause ces professionnels en raison d’une supposée faute qui aurait été commise, la loi a rendu obligatoire la souscription d’une Assurance Responsabilité Civile Professionnelle. Cette garantie se distingue de la responsabilité civile des particuliers, qui est souvent englobée dans une assurance habitation. La responsabilité civile se fonde sur une règle juridique édictée à l’article 1231-1 du Code Civil, en ce qui concerne la responsabilité civile contractuelle, et aux articles 1240 et 1241 du même Code, en ce qui concerne la responsabilité civile délictuelle, qui disposent que « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer » et que « Chacun est responsable du dommage qu’il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence ».
Cette garantie assurantielle couvre les dommages causés à un tiers dans le cadre des activités professionnelles déclarées, suite à une faute commise lors de l’exécution d’une prestation. Elle permet aux tiers de bénéficier d’une indemnisation des conséquences financières de cette faute. La RC Pro couvre les dommages matériels, immatériels et corporels. Ainsi, si un médecin commet une erreur médicale générant une hospitalisation d’urgence du patient ainsi qu’une perte de revenus, la responsabilité civile professionnelle est susceptible d’intervenir. Si l’assuré écrase par erreur les données informatiques de l’un de ses clients, les éventuelles conséquences de cette erreur peuvent potentiellement être prises en charge.
Un impact sur l’activité à prendre en compte
Ce risque concerne essentiellement les dommages immatériels pouvant être complexes à appréhender, notamment lors de prestations de conseil. En effet, un “mauvais conseil” peut être source de conséquences financières importantes. Dans certains cas, il peut vite se transformer en une situation de crise pour le client qui peut subir les conséquences d’un redressement fiscal qu’il ne peut payer. A noter : un simple redressement ne justifie pas pour autant la prise en charge de l’intégralité des sommes rappelées. En effet, seules les sommes redressées qui auraient pu être évitées en l’absence de toute faute peuvent s’apparenter à un coût supplémentaire. Il est donc nécessaire que le demandeur justifie de la manière dont le montant réclamé aurait pu ne pas être dû en l’absence de toute faute de l’assuré.
En matière de conseil, et en particulier sur les sujets d’optimisation fiscale, il n’existe pas forcément une seule solution. Le professionnel peut potentiellement donner un conseil qui ne permet pas d’obtenir les meilleurs avantages. De ce point de vue, le professionnel du chiffre peut voir sa responsabilité mise en cause, à la suite d’un conseil qui n’aurait pas permis à son client de réaliser les économies d’impôts envisagées.
Plus-value et rôle de l’expert
La plus-value de l’expert sera ici d’analyser la réclamation afin d’appréhender si la solution alternative proposée dans le courrier de réclamation aurait éventuellement permis d’acquitter moins de droits (voire d’éluder toute fiscalité) et s’il apparaît crédible et/ou possible que le demandeur opte pour cette option. C’est en ce sens que cette typologie de dossier s’appréhende, généralement sous l’angle d’une perte de chance, afin d’envisager un montage alternatif en l’absence de toute faute. Dans ces situations, l’assuré pourra déclarer le sinistre auprès de sa compagnie d’assurance afin d’être accompagné dans le dénouement de cette situation délicate.
Les professions réglementées peuvent bénéficier de spécialistes, qui examineront la situation avec un regard neutre et impartial. Le rôle de l’expert est avant tout d’analyser la réclamation et les pièces du dossier pour déterminer si la responsabilité de l’assuré est susceptible d’être retenue et si le montant réclamé semble justifié. Pour permettre à l’assureur de se positionner sur la réclamation, l’intervention de l’expert vise à synthétiser et vulgariser des sujets souvent complexes, afin que le gestionnaire dispose d’une bonne compréhension des faits, de l’analyse effectuée et de la réponse à la réclamation préconisée. Compte tenu de l’évolution perpétuelle des réglementations, l’expert doit être au fait des dernières jurisprudences à travers une veille lui permettant d’appréhender la position des Tribunaux en cas de dérive judiciaire.
Stéphanie LAROCHE – Expert risques financiers
Stelliant Expertise
Vincent BLONDIN – Manager risques financiers
Stelliant Expertise