La garantie actif / passif : un atout indéniable

Fragilisée par la conjoncture actuelle, les opportunités de rachats d’entreprises ou de franchises font face à deux problématiques : d’un côté l’émergence d’un marché plus favorable aux acheteurs, en raison de la pandémie et du ralentissement de l’activité, et de l’autre le maintien d’un marché encore très concurrentiel, et favorable aux vendeurs sur les actifs de qualité. Si la pandémie a fragilisé de nombreuses sociétés dans des secteurs comme la restauration, l’hôtellerie, le tourisme, l’aéronautique ou l’industrie automobile, en revanche, certains secteurs d’activité ont tiré leur épingle du jeu : grande distribution, le commerce numérique, l’électronique et le secteur pharmaceutique. Cette situation multiplie les opportunités de rachat, entrainant un accroissement des fusions/acquisitions ainsi que des souscriptions de la garantie « Actif/Passif ». Tour d’horizon de cette police encore méconnue, mais qui constitue un atout indéniable en matière de Fusions & Acquisitions.

La garantie « actif/passif » : une sécurité pour l’acheteur

Police d’assurance, initialement très prisée sur le marché anglo-saxon, elle s’est désormais installée sur le marché français au cours des 5 dernières années, avec un certain succès. La garantie « Actif / Passif » est une clause contractuelle prévue au sein du protocole de cession dans les opérations de fusions & acquisitions d’une entreprise. Cette clause prévoit généralement l’indemnisation de l’acquéreur par le vendeur de tout accroissement du passif ou diminution d’actif dans les comptes de référence ayant servis à la transaction et découverts postérieurement au closing de l’opération (= transfert de propriété effectué). Le vendeur s’engage ainsi à compenser toute perte découverte après la conclusion de la transaction dont l’origine proviendrait d’un évènement antérieur au closing. 

 

Les opérations de Fusions et Acquisitions ont connu une forte croissance en 2020, notamment dans le secteur des technologies, des médias et des télécommunications ; secteurs où l’investissement est le plus important en comparaison au secteur industriel. Dans un contexte économique incertain, l’assurance garantie “Actif/Passif” devient incontournable pour sécuriser l’acheteur : en souscrivant à cette police d’assurance auprès de son assureur, l’acquéreur disposera de la faculté de transférer le risque encouru à la compagnie qu’il l’indemnisera en cas de découverte d’une irrégularité comptable (appelée breach) générant, après closing, une surévaluation non justifiée de l’actif de la société cédée (ou, une sous-évaluation des dettes de celle-ci). Ces « breaches » sont toutefois limitées à celles prévues par la police souscrite par l’assuré. Elles portent généralement sur des sujets d’ordre fiscal, social ou encore comptable (provision insuffisante au sein des Comptes Garantis par exemple). Ce transfert de risques vers une tierce partie permet d’avoir de meilleures chances de voir l’opération se concrétiser, et ce, dans un climat plus serein entre acheteur et vendeur.  

Quel rôle pour l’expert d’assurance ?

Pour faire face à des situations parfois complexes, les entreprises et les professionnels impactés ont besoin d’une expertise à la fois technique, claire et didactique. Missionné par la compagnie d’assurance, l’expert doit : 

  • vérifier l’existence effective du ou des « breach » signalé(s) par l’acheteur,  
  • décomposer méthodiquement et en toute objectivité, l’intégralité de la chaîne d’évènements ayant conduit à la découverte de ces « breaches », après le closing de l’opération.  

 

La mission principale de l’expert d’assurance : déterminer les causes de la perte estimée par l’acquéreur, vérifier les circonstances et évaluer, sur la base d’investigations précises, le dommage subi par celui-ci.  A ce titre, l’expert examine les comptes de référence, c’est-à-dire les comptes Garantis, le SPA (contrat de cession), la « dataroom » mise à la disposition de l’acquéreur par le vendeur, les travaux de Due Diligences, les rapports du commissaire aux comptes de la société cible en plus des éléments fournis par l’assuré justifiant de sa perte. A partir de ces données, l’expert sera en capacité, le cas échéant, de définir le montant de la perte. A cet égard, des cas spécifiques peuvent apparaître et nécessitent une vigilance particulière. Pour illustration, pour certains assurés, la perte subie peut relever d’une perte de chance de pas avoir pu négocier un prix de cession à la baisse du fait des irrégularités comptables qu’ils constatent au sein des comptes garantis. Cependant, l’esprit de l’assurance garantie actif passif et les Polices présentes sur le marché, ne permettent pas d’indemniser une telle perte de chance ou une différence de prix, mais bien uniquement les impacts financiers consécutifs à un « breach ».  

 

Aujourd’hui, la conjoncture multiplie les opérations de cessions et d’acquisitions d’entreprises, de telle sorte, que nous assistons à un phénomène d’accroissement exponentiel de la souscription de l’assurance de la garantie « Actif/Passif ». Autre conséquence de cette conjoncture, l’émergence et le développement de nouveaux risques comme les attaques Cyber ou de nouveaux modes opératoires à des fins de fraudes financières ou commerciales : ingénierie sociale visant à l’exploitation des faiblesses psychologiques, sociales et organisationnelles des individus et des entreprises. Ainsi, la cartographie des risques dans la vie des affaires évolue à un rythme effréné…  Le monde de l’assurance doit ainsi faire preuve d’innovation, d’adaptation et d’écoute, pour garantir les meilleures solutions de mutualisation des risques pour les entreprises. 

 

Joëlle Lebernady 

Expert Risques Financiers  

groupe Stelliant 

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