Comment identifier le sinistre sériel ?

Un rappel de produit ou un défaut de fabrication d’un produit commercialisé par la grande distribution sont des faits souvent relayés par la presse. Depuis le mois d’avril, le Gouvernement, sous l’autorité du Ministère de l’Economie, a mis en place un site web (rappel.conso.gouv.fr) ayant pour vocation d’informer le consommateur sur les produits rappelés par la grande distribution. Outil supplémentaire à disposition de l’expert pour déceler un sériel, l’expertise n’en reste pas moins un métier où se conjugue prise de recul, accompagnement opérationnel et support technique pour réguler les réclamations lors d’un sinistre.

Comprendre le risque de sériel

Que ce soit en agro-alimentaire ou dans le secteur des biens de consommations, un rappel de produit a une conséquence financière pour toute entreprise. Un sinistre dit « sériel » peut représenter un montant de dommage important et toute la difficulté réside dans le fait que l’on ignore au départ l’ampleur du sinistre… Il y a-t-il un ou plusieurs lots de marchandises concernés par ce rappel ? Quelles en sont les conséquences en cas de dommages ? Autant de questions qui complexifie l’identification du risque sériel et sa résolution. 

Avec plusieurs dizaines de rappels par jour, l’agro-alimentaire reste le secteur d’activité le plus dense, qu’il s’agisse d’un produit présentant un danger non conforme ou d’une injonction des autorités pour procéder à un rappel dans le cas de la présence d’éléments dangereux (corps étrangers, pesticides etc.). Ce dernier cas nécessite un travail systématique, en coordination avec les autorités, à réaliser, tandis que l’assuré doit prendre contact avec sa compagnie qui, de son côté, exerce une veille réglementaire.  

Comment se déclenche la procédure ?

A aujourd’hui, il n’y a pas de définition juridique propre au sinistre sériel. Un sinistre dit « sériel » évoque un incident portant sur un ensemble de dommages et/ou de faits dommageables ayant une même cause technique sur plusieurs produits d’un même fournisseur.   

Lorsque le défaut du produit est découvert, et qu’il s’agit d’une entorse à la règlementation, alors l’industriel doit alerter les autorités sanitaires. C’est à ce moment précis que la procédure de retrait rappel se déclenche.

Pour le secteur agro-alimentaire, il peut s’agir de l’introduction d’un corps étranger, une contamination ou une analyse de risques. 

Pour le secteur industriel, il va s’agir d’un produit défectueux qui n’apporte pas la sécurité à laquelle on doit s’attendre.  

Quel est le rôle de l’expert ?

Face à une situation de crise, les assureurs font appel aux experts afin de procéder à l’identification du risque potentiel sériel : déterminer le nombre de pièces fabriquées et lesquelles sont concernées par le sinistre, quelles conséquences cela peut avoir et combien d’ouvrages industriel peuvent être touchés.  

En cas de sinistre dans le secteur agro-alimentaire, si une contamination physique par pesticide est repérée (la majorité des sinistres), c’est le taux non conforme sur une molécule de pesticide qui doit être effectuée par le client qui aura incorporé cette matière première dans un produit fini. 

Dans ce type de situation, le client doit informer la Direction Départementale de la Protection des Populations locales (qui dépend de la DGCCRF). De son côté, la DDPP doit répondre et confirmer le retrait du produit, pour la DDPP du fournisseur doit informer ou directement émettre une injonction au fournisseur de la matière première pour qu’il initie une campagne de rappel de produits pour tous ses clients. 

En cas de sinistre dans le secteur industriel, lors d’un incendie par exemple concernant un produit, l’expert peut faire appel à un sapiteur RCCI qui est appelé pour déterminer les signes laissés par l’incendieL’expert demande le contexte du produit à réception de la mission. S’il s’agit d’un premier sinistre, l’expert recherche la cause potentielle après examen du produit. 

Pendant le sinistre, l’expert accompagne l’assuré dans le suivi de la communication de crise. Lors d’un rappel de produits, l’expert peut également contribuer à la rédaction d’une ébauche de lettre où la demande de mesures conservatoires est alors mis en place.  Face à l’abondance des réclamations auxquelles l’assuré peut faire face, il est primordial pour l’expert d’être force de proposition : apport de solutions avec numéro vert, tableaux Excel partagé, outils collaboratifs sur mesure etc. 

Et ensuite ?

Option souvent comprise dans le contrat d’assurance d’une entreprise sur le volet de la Responsabilité Civile Professionnelle, la garantie frais de retrait couvre les coûts nécessaires au retrait d’un produit susceptible de causer un danger ou ayant déjà provoqué un préjudice à un consommateur. Défaut de conception, malfaçon, défaillance d’une pièce… Quelle que soit la cause du rappel, les produits de consommation peuvent présenter des risques sérieux pour les consommateurs. Parfois sériel, le risque implique l’intervention rapide d’un expert spécialiste, au carrefour de plusieurs interlocuteurs, en France et à l’international.  

Dans ce cadre, l’expert joue le rôle de médiateur en argumentant et en déterminant si la situation est dangereuse ou pas. Grâce à son travail, l’expert peut définir, l’impact potentiel du sériel à l’assuré qui peut, lorsqu’il est en désaccord avec les conclusions du rapport, provoquer une contre-expertise. 

Avec une vraie difficulté à savoir où le sinistre commence et où il s’arrête, le risque sériel est à considérer. Indispensable dans sa prévention, lorsqu’il survient, une véritable gestion de crise et une expertise poussée ainsi qu’une grande réactivité sont nécessaires à la résolution de cet incident.

Nicolas PATRIS

Expert, Manager Responsabilité Civile Sud-Est – Référent National RC Produits

groupe Stelliant

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